Calcul LifeTime Value : Comment estimer la Customer Lifetime Value de ses abonnés ?
« Le problème de notre temps c’est que le futur n’est plus ce qu’il a été. » – Paul Valéry
Aucune industrie n’y semble y échapper ; le nombre d’entreprises proposant une offre par abonnement augmente de façon exponentielle. Il faut dire que ce modèle économique dispose d’atouts non négligeables.
Du côté des consommateurs, il est en phase avec les nouvelles aspirations d’une génération Y moins attirée que ses aînées par le fait de posséder les biens qu’elle utilise.
L’étude ci-dessous démontre par exemple que les -de 35 ans nord-américains sont plus de 2 fois plus nombreux que leurs aînés à avoir recours à l’économie collaborative.
L’économie #collaborative portée par les #Millennials
(enquête se basant sur les internautes nord-américains). pic.twitter.com/SVQfgXgfrb— La Strat (@LaStratFr) 30 mai 2017
Et d’autre part, il permet aux entreprises l’adoptant de bénéficier, entre autres, d’une forte visibilité sur leur trésorerie. Mais encore faut-il pour cela calculer correctement les indicateurs clés émanant de ce modèle économique. Ce qui exige d’avoir une vision précise de la Customer Lifetime Value (LTV) ou de la valeur vie de vos clients.
Définition de la LTV ?
La Valeur vie correspond à la somme des profits attendus en moyenne sur la durée de vie d’un client type. Les profits sont calculés en minorant les revenus par le taux de marge brute. Tout l’art de ce calcul réside dans le fait d’effectuer la projection la plus précise de l’avenir, plutôt que de se contenter de l’analyse des données antérieures (si tenté que votre ancienneté puisse vous le permettre).
Pourquoi est-il utile d’estimer sa LTV ?
Définir son budget dédié à l’acquisition client (CAC):
Si vous savez que votre LTV est de X €, alors vous pouvez vous permettre de dépenser Y € pour attirer un nouvel abonné, sans mettre en péril vos finances. Dans l’univers des startups, il est préconisé de se fixer un CAC 3 fois inférieur à la LTV.
Déterminer la durée d’amortissement d’un nouveau client :
La LTV permet aussi de déterminer à partir de quel moment un abonné commence à rapporter de l’argent. Autrement dit, l’indicateur répond à la question « À partir de quelle date les frais engagés pour acquérir ce nouvel abonné seront totalement couverts par ses dépenses ? ». Évidemment, plus ce moment intervient tard, plus le pari de votre entreprise est risqué. Là encore, il est, en règle générale, recommandé de ne pas excéder les 12 mois.
La Formule basique du calcul de la LTV :
ARPU : Average Revenue Per User Le Revenu moyen par abonné. Soit, ici, le montant moyen perçu mensuellement par abonné sur l’ensemble de vos clients actifs. Taux de marge brut : La différence entre les revenus générés et le coût de production / acquisition du bien/service. Ainsi, les start-ups commercialisant une solution SaaS se distinguent par un taux de marge brute élevée ( > à 85%), puisqu’elles n’ont souvent qu’à y inclure les frais d’hébergement et autres services tiers utilisés pour assurer la gestion de la relation client. Taux d’attrition client : ou Churn Rate mesure, lui, le phénomène de perte d’abonnés en représentant le ratio (nombre de clients perdus / nombre de clients totaux) mesuré sur une période délimitée. Dans notre cas, on prendra un mois. (ps : pour les personnes intéressées à l’idée de disposer d’un moyen fiable pour calculer leur churn rate, nous proposons une méthodologie à suivre sur cet article et vous offrons un modèle de tableur automatisant son calcul ci-dessous.)
Limites de la formule basique du calcul de la LTV :
Elle présume que votre courbe de désabonnement sera linéaire dans le temps.
Cette formule basique du calcul de la LTV suppose que vos cohortes d’abonnés suivront une courbe d’attrition linéaire. Personnellement, je n’ai jamais rencontré ce cas de figure. La plupart des business enregistrent en effet un taux de désabonnement significativement plus important dans les premiers instants de vie d’une cohorte, avant de voir, ensuite, leur courbe de désinscription s’adoucir. Ainsi dans le graphique ci-dessus, la courbe bleue dite « réaliste » engendrera une LTV inférieure à celle que nous avons pu calculer en nous basant sur un modèle linéaire, matérialisé, ici, par la courbe rouge.
Cette formule ne tient pas en compte de votre faculté à upseller ou à faire upgrader vos abonnés.
Votre abonné X a souscrit à votre plan à 50€ par mois. Vous estimez qu’il devrait vous quitter dans un an. Il vous aura alors rapporté 600€. Votre abonné Y a souscrit en même temps, à la même offre et devrait lui aussi rester une année. Cependant il upgrade au 4ème mois pour passer sur votre offre intermédiaire à 75€ par mois, puis rejoint enfin votre offre avancée à 100€ par mois pour le 8ème mois. L’abonné Y vous aura ainsi rapporté, in fine, 950€ ! Là encore, notre modèle de base ne prend pas en compte ces évolutions surgissant au cours de l’année alors qu’elles ont un réel impact sur la LTV. Elle produit, in fine, une estimation trop optimiste. En effet, les risques inhérents à l’environnement de votre entreprise ne sont pas du tout pris en considération. Alors qu’il se pourrait très bien qu’une concurrence soudainement accrue vous oblige à revoir vos prix à la baisse ou qu’une succession de remises commerciales tire votre LTV à la baisse. Enfin, cette méthode oublie qu’une même somme d’argent perd, avec le temps, de la valeur (surtout en temps d’inflation, comme nous vivons actuellement).
Calculer la LTV avec la formule de David Slock
Voici ci-dessous le détail de cette nouvelle formule :
Explication des nouveaux facteurs intégrés :
G correspond au taux de croissance annuel enregistré par vos clients ne s’étant pas désinscrits. K est votre coefficient réducteur. Il est calculé ainsi : K = (1- Taux d’attrition) x (1- Taux de handicap) Le taux de handicap est le ratio dans lequel vous devez englober toutes formes de risque encourues. Si vous ne disposez pas encore d’une croissance prévisible à moyen terme, optez pour un taux compris entre 20 et 25%.
Comparaison de ces 2 méthodes :
Imaginons que Monsieur Martin possède une solution SaaS comptabilisant 1 000 clients, lui générant mensuellement 300 000 €. Son ARPU est donc de 300 €. Disons, ensuite, que sa marge brute est, elle, de 85% et que son taux d’attrition annuel est lui de 10%. Pour finir, il choisit d’appliquer un taux de handicap de 20%. Puis, enfin, se base sur une augmentation des dépenses de ses abonnés qui ne se désinscriront pas, de 25%. La formule basique donne alors une LTV de 2 550 €
Alors que celle provenant de la formule de David Skok affiche 1 496,17 €
On se retrouve donc au final avec un résultat beaucoup plus modeste, mais prenant en compte un plus large éventail d’éléments. Ce dernier nous est donc bien plus utile. Rappelons que si prévoir le futur est, par définition, impossible, c’est de la justesse de la collecte de vos KPI (indicateurs clés de performance) que dépend la subtilité de vos futures prises de décisions.
Pour conclure, sachez que nous avons conscience que cet article survole beaucoup de concepts qui ne sont, en apparence, pas faciles à appréhender. N’hésitez donc pas à nous solliciter dans les commentaires si vous souhaitez nous voir détailler certains choix de formule.
Enfin, pour vous féliciter d’être arrivé au bout de l’article, nous vous offrons un fichier excel permettant d’automatiser le calcul de la LTV en suivant la méthode de David Skok (spoiler : le fichier inclut également une astuce pour pouvoir réaliser ce calcul lorsque certaines données font défaut 😉 )
Bonne analyse !
À propos de l’auteur
Lucas Maere est un entrepreneur français, diplômé d’un Master 2 en Science politique.
Depuis 2013 il accompagne le développement de PME française en pilotant leur dispositif d’acquisition.
6 b. Bd Berthelot, Bureau 3
34000 Montpellier
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